Trou d'ère
En aéronautique, le trou d'air se définit comme une zone atmosphérique affectée par des courants descendants. Le terme, utilisé par DSK lorsqu'il était ministre de l'économie - ô le temps bénit de la dream team jospinienne entre 1997 et 2000 - pour marquer une légère décélération de la croissance a, depuis, fait florès. Le moindre mouvement à la baisse d'un quelconque baromètre est ainsi accolé de ce terme passe-partout, qu'il touche à la Bourse, à la cote d'un candidat, que sais-je encore. Ainsi du planeur Royal à propos duquel certains, de plus en en plus nombreux, ont le mot "crash" au bord des lèvres. Tout le dérisoire de cette pré-campagne se résume là.
Exit donc de cette vaine logorrhée du commentaire dont on se demande qui il peut encore passionner, voire mobiliser et, d'un trou l'autre, si j'ose, passons à celui, autrement plus préoccupant, de la couche d'ozone. Le rapport 2004 du GIEC - 600 chercheurs de toute la planète - confirme celui de 2001 et renforce le consensus scientifique autour de deux constats :
1 Le réchauffement climatique est établi (même avec la diminution du Gulf Stream, contrairement à ce qui est souvent dit, les scientifiques montrent que le réchauffement se poursuivrait)
2 L'activité humaine en est directement responsable (même si on arrêtait les émissions de gaz carbonique maintenant, il faudrait plus d'un millier d'années avant de retourner aux valeurs préindustrielles)
Canicules, typhons, cyclones, désertification, tous ces excès climatologiques sont donc, et seront désormais, notre lot commun. A moyen terme, un siècle, la montée des eaux pourrait approcher 50 cm. Et, ce, quoi que l'on fasse quant aux réductions de gaz à effet de serre. Voilà pour notre présent. Quid de l'avenir devant ces faits têtus ? Et bien, ni l'Inde, ni la Chine, pour ne prendre que ces monstres émergents, ne connaîtront un développement comparable au nôtre, nolens volens, car ces deux pays sont déjà l'un et l'autre très affectés de ces évolutions (pour ne citer que la Chine, elle connait une désertification en son centre, et une recrudescence de typhons sur sa côte orientale). Dans l'état actuel de la technologie, il est fou, par exemple, de penser que l'automobile individuelle puisse devenir sous ces latitudes une clé de voûte de la société tout comme, au niveau global, il apparait dément d'envisager que le trafic aérien puisse progresser au même rythme qu'aujourd'hui. Das Kapital a ainsi devant lui un enjeu digne de sa capacité d'innovation schumpéterienne, bien plus important encore que les stocks de créances douteuses qui menacent sans cesse la belle ordonnance de ses flux. Le dernier grand suspens de cette époque tient sans doute à la capacité du système capitalistique à faire de cette contrainte, de ce handicap, un nouveau moteur de sa prospérité. Le tout est de savoir comment. Et, le fait est que, cette fois, nul Marx ne se profile pour lui souffler, paradoxalement, la voie à suivre, l'écologie politique n'étant que la répétition, sous forme de farce, de l'économie politique (1).
Alors, ceci posé, tout comme le fait qu'il s'agit là d'un propos de privilégié, conscient des effets de champ sociologique, je n'hésiterai pas à livrer ce sentiment d'un véritable trou d'ère. Que veux-je dire par là ? Que tous nos systèmes de croyances, pour commencer par eux, sont également victimes, en simultané, de courants descendants. Qu'il en est de même de nos cadres de représentation. Comme de l'art, de la musique ou de la pensée. En un mot, et il n'est pas sûr que le seul Occident soit concerné, notre petite humanité réduite aux acquets subit une sorte de dépressurisation dans sa cabine, sa bulle atmosphérique, sa sphère protectrice. High speed internet but low intensity. Et je jure qu'il ne s'agit pas là de m'associer à la compétition des mauvaises nouvelles, au concours des apocalypses. Alors que nous aurions tant besoin d'un air froid et sec pour respirer l'air des cîmes (celui du Zarathousra de Nietzsche), la dépression nous menace sous toutes ses espèces. Quel nouvel évangéliste viendra nous convaincre que nous ne sommes pas les derniers hommes ?
(1) La première phrase de l'ouvrage de Marx consacré au 18 Brumaire s'ouvre ainsi : "Hegel fait quelque part cette remarque que tous les grands événements et personnages historiques se répètent pour ainsi dire deux fois. Il a oublié d'ajouter : la première fois comme tragédie, la seconde fois comme farce".
Exit donc de cette vaine logorrhée du commentaire dont on se demande qui il peut encore passionner, voire mobiliser et, d'un trou l'autre, si j'ose, passons à celui, autrement plus préoccupant, de la couche d'ozone. Le rapport 2004 du GIEC - 600 chercheurs de toute la planète - confirme celui de 2001 et renforce le consensus scientifique autour de deux constats :
1 Le réchauffement climatique est établi (même avec la diminution du Gulf Stream, contrairement à ce qui est souvent dit, les scientifiques montrent que le réchauffement se poursuivrait)
2 L'activité humaine en est directement responsable (même si on arrêtait les émissions de gaz carbonique maintenant, il faudrait plus d'un millier d'années avant de retourner aux valeurs préindustrielles)
Canicules, typhons, cyclones, désertification, tous ces excès climatologiques sont donc, et seront désormais, notre lot commun. A moyen terme, un siècle, la montée des eaux pourrait approcher 50 cm. Et, ce, quoi que l'on fasse quant aux réductions de gaz à effet de serre. Voilà pour notre présent. Quid de l'avenir devant ces faits têtus ? Et bien, ni l'Inde, ni la Chine, pour ne prendre que ces monstres émergents, ne connaîtront un développement comparable au nôtre, nolens volens, car ces deux pays sont déjà l'un et l'autre très affectés de ces évolutions (pour ne citer que la Chine, elle connait une désertification en son centre, et une recrudescence de typhons sur sa côte orientale). Dans l'état actuel de la technologie, il est fou, par exemple, de penser que l'automobile individuelle puisse devenir sous ces latitudes une clé de voûte de la société tout comme, au niveau global, il apparait dément d'envisager que le trafic aérien puisse progresser au même rythme qu'aujourd'hui. Das Kapital a ainsi devant lui un enjeu digne de sa capacité d'innovation schumpéterienne, bien plus important encore que les stocks de créances douteuses qui menacent sans cesse la belle ordonnance de ses flux. Le dernier grand suspens de cette époque tient sans doute à la capacité du système capitalistique à faire de cette contrainte, de ce handicap, un nouveau moteur de sa prospérité. Le tout est de savoir comment. Et, le fait est que, cette fois, nul Marx ne se profile pour lui souffler, paradoxalement, la voie à suivre, l'écologie politique n'étant que la répétition, sous forme de farce, de l'économie politique (1).
Alors, ceci posé, tout comme le fait qu'il s'agit là d'un propos de privilégié, conscient des effets de champ sociologique, je n'hésiterai pas à livrer ce sentiment d'un véritable trou d'ère. Que veux-je dire par là ? Que tous nos systèmes de croyances, pour commencer par eux, sont également victimes, en simultané, de courants descendants. Qu'il en est de même de nos cadres de représentation. Comme de l'art, de la musique ou de la pensée. En un mot, et il n'est pas sûr que le seul Occident soit concerné, notre petite humanité réduite aux acquets subit une sorte de dépressurisation dans sa cabine, sa bulle atmosphérique, sa sphère protectrice. High speed internet but low intensity. Et je jure qu'il ne s'agit pas là de m'associer à la compétition des mauvaises nouvelles, au concours des apocalypses. Alors que nous aurions tant besoin d'un air froid et sec pour respirer l'air des cîmes (celui du Zarathousra de Nietzsche), la dépression nous menace sous toutes ses espèces. Quel nouvel évangéliste viendra nous convaincre que nous ne sommes pas les derniers hommes ?
(1) La première phrase de l'ouvrage de Marx consacré au 18 Brumaire s'ouvre ainsi : "Hegel fait quelque part cette remarque que tous les grands événements et personnages historiques se répètent pour ainsi dire deux fois. Il a oublié d'ajouter : la première fois comme tragédie, la seconde fois comme farce".
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